Lettre ouverte de :
Pierre-André Loizeau, ancien directeur des Conservatoire et Jardin botaniques de Genève
Campagne-Masset: «Une opportunité unique et nécessaire»
Nous vivons dans une société de plus en plus urbaine. Sur le plateau suisse, près des trois quart de la population vit en ville. Or nous ne devons pas perdre de vue que la nature sauvage et les services écosystémiques qu’elle offre gratuitement sont aussi importants pour la survie de notre espèce humaine qu’une économie dynamique ou un système de santé performant.
Les Jardins et les parcs publics, généralement moins riches en termes de biodiversité, offrent cette possibilité d’un accès à la nature et à un environnement réconfortant et réparateur. J’ai moi-même accompagné, dans le cadre de son conseil scientifique, une association française, Jardin & Santé, dont le but est de mettre en place des jardins thérapeutiques à proximité notamment des hôpitaux. De nombreuses études démontrent que ces jardins ont un effet positif sur les patients par la médiation qui y est pratiquée, autant en relation avec des problèmes de santé mentales que comme soutien dans le traitement de maladie diverses.
Comme il vaut mieux prévenir que guérir, la mise à disposition de la population de parcs publics dans lesquels elle puisse déambuler et se ressourcer est un élément favorisant l’équilibre de la société. Je soutiens l’idée de l’ouverture de la campagne Masset dans une zone qui s’est densifiée sans que des parcs n’y soient aménagés. C’est une occasion unique, au vu du cadastre et des possibilités futures, de donner aux habitants du quartier la possibilité de recréer ou renforcer un lien à la nature, si important pour l’équilibre mental de l’être humain.
Il est tout à fait possible d’aménager un parc public dans cet espace. La pente n’est pas pire que celle du Domaine de Penthes, dont les Conservatoire et Jardin botaniques de Genève assurent l’entretien pour le compte de l’Etat depuis 1993. Le public y vient nombreux sans que cela ne pose de problème insurmontable.
Les différents niveaux favorisent une sectorisation par thèmes, en fonction des objectifs futurs soit au niveau de la gestion du parc, soit en connexion avec les activités de la maison de maître. Ce qui aurait pu apparaître comme un obstacle constitue selon moi une opportunité.
Ce parc apporterait un dégagement très largement bénéfique au cheminement qui est déjà aménagé le long du Rhône et qui mène jusqu’au quai du Seujet. Il offrirait une alternative salutaire au chemin actuel permettant de rejoindre l’avenue d’Aïre, qui longe les immeubles et passe sur un parking.
En termes de biodiversité végétale, nous avons une forêt d’espèces plutôt indigènes, une vigne et une prairie extensive. Rien d’affolant en espèces rares ou remarquables.
Cependant, cette végétation est déjà indispensable à tout une faune utile et nécessaire dans ce périmètre de Protection Nature et Paysage inclus dans les sites Emeraude et l’Ordonnance fédérale sur les réserves d’oiseaux d’eau et de migrateurs.
Par ailleurs, on pourrait aussi faire évoluer cette prairie, grâce à son exposition sud et par une gestion adéquate des fauches, vers un milieu plus riche.
Concernant la vigne, elle pourrait devenir le vignoble symbolique de la municipalité et renforcer celle qui a été plantée sur le Bastion Saint-Léger. Mais elle pourrait aussi disparaître au profit d’aménagements nécessaires au programme prévu pour le parc.
En conclusion, pour moi, cet achat s’inscrit dans la Stratégie biodiversité de la Ville de Genève, et la transformation de la campagne Masset en parc public est une opportunité unique et nécessaire au bien être des habitants du quartier.
Dr Pierre-André Loizeau, ancien directeur des Conservatoire et Jardin botaniques de Genève
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